Chants et danses funéraires des Toraja

Je dois beaucoup aux Toraja. Mon premier voyage date de 1991 et le tournage de ce film de 2006. J’avais, à l’époque, été invité à de grandioses funérailles pour y enregistrer mes premiers chants. Je me tenais à distance respectable d’un groupe de chanteurs-danseurs de badong quand l’un d’entre eux quitta la ronde pour venir me chercher. Il me prit par la main et me conduisit au beau milieu du cercle. Là, assis par terre, le casque visé sur les oreilles, j’explorais en stéréophonie les diverses parties de répons entre les chanteurs. Ce moment fut décisif. Je sentais que ce que je faisais-là était pour moi le plus beau métier du monde ! 30 ans plus tard : j’y suis, j’y reste ! J’ai, entre-temps, rencontré Dana Rappoport, chercheur au CNRS. Elle s'est nourri de cette extraordinaire culture toraja : une thèse, de nombreuses publications, un DVD-ROM en quatre langues (français, anglais, indonésien, toraja) à travers lequel elle souhaite restituer tout ce patrimoine confié par les sachants.

Ce film et son complément « Cérémonie chrétienne et mise au tombeau » sont le fruit de notre passion commune. Les connaissances pointues de Dana Rappoport et son expérience de la communication donnent à ces documents un grain particulier, leur offrent une proximité, une belle humanité. Par la compréhension ainsi apportée, puissent-ils contribuer à mieux respecter les peuples dans leurs différences ; puissent-ils nous convaincre de ne pas imposer de modèle en laissant à chacun la liberté de choisir la voie qui lui convient.

Les Toraja vivent sur l’île de Sulawesi, en Indonésie. Les funérailles de la haute noblesse s’inscrivent dans la démesure : plus de trois mille invités durant une semaine, des centaines d’animaux sacrifiés, de grandes rondes de chanteurs-danseurs qui s’affrontent… Par ces rituels somptueux et outranciers, le défunt partira sur la route de l’ancestralité. En retour, les vivants recevront la protection des ancêtres.