Gongs du Laos


Les minorités ethniques du sud du Laos, à l'instar de celles du centre du Viêt Nam et du Nord-Est du Cambodge, jouent des ensembles de gongs. Le nombre d'éléments dans chaque ensemble varie de deux à vingt selon l'ethnie et l'occasion. Ces instruments et leur jeu sont d'un intérêt de premier plan dans l'histoire musicale de l'Humanité. Les gongs joués au Viêt Nam, similaires dans l'esprit à ceux de ses deux voisins que sont le Laos et le Cambodge, ont été inscrits sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité sous le vocable « L’espace de la culture des Gongs ». GeoZik a effectué deux missions de collectage en 1999 et 2006 au Laos. Afin de présenter la pluralité des ensembles de gongs, nous avons opté pour une entrée alphabétique des ethnies.

 

Textes, photos, vidéos © Patrick Kersalé 1998-2024, sauf mention spéciale. Dernière mise à jour : 15 septembre 2024.


SOMMAIRE

PISTES PÉDAGOGIQUES

  • Matériaux. Quels matériaux composent les gongs ?
  • Structure sociétale et musique. Quelle est l'influence de la structure d'une société sur celle des orchestres ? 
  • Pratique. Apprenez à jouer une mélodie connue avec la technique du hoquet en utilisant les instruments à votre disposition. Observez et décrivez l'état de concentration des participants.
  • Allez plus loin avec les Éditions Lugdivine.

Le gong en Asie du Sud-Est

En Asie du Sud-Est, le gong a été et demeure un objet de grande valeur, entouré d’obligations, d’interdits et de mystères.

Il existe plusieurs types d’organisations physiques des gongs : les gongs isolés, les carillons de gongs joués par un seul instrumentiste et les ensembles de gongs joués à plusieurs. Dans les trois cas, soit les gongs se suffisent à eux-mêmes, soit ils sont accompagnés d’autres instruments ou de chants.

Sur le plan organologique, on distingue deux types de gongs : les gongs plats et les gongs à mamelon dits aussi gongs à bosse, gongs bulbés ou encore gongs renflés. Ils sont fabriqués artisanalement par martèlement de plaques de métal préalablement fondues (ou récupérées, ce qui est aujourd’hui souvent le cas), composées d'un alliage de cuivre (70% à 80%), d’étain et/ou plomb (30% à 20%), avec parfois des traces d’argent, d’or, de fer ou de zinc pour les plus anciens et selon les informations collectées parmi les connaissances ou croyances de ces peuples.

Quelle que soit la préciosité de leurs matériaux, les gongs représentent, pour les familles qui les possèdent, un signe extérieur de richesse et de prestige. Certaines familles en possèdent parfois plusieurs. Autrefois, les gongs représentaient une monnaie d’échange pour acheter buffles et éléphants ou encore pour s’acquitter d’une dette à la suite d’un jugement prononcé par le tribunal traditionnel. Selon leur taille et la qualité de leur alliage, ils pouvaient être échangés contre un éléphant, des buffles, un esclave ou servir à racheter une faute.

Autrefois, les gongs étaient fabriqués au Laos et au Viêt Nam selon deux techniques : martèlement et fonte. Ces derniers sont les plus précieux ; on les reconnaît à la trace laissée par le moule dans le diamètre.

 

Conception sociale

L’ensemble de gongs doit être considéré comme un seul et même instrument et non comme une multitude. Toutes les sociétés d’Asie du Sud-Est jouant les gongs ont une vision collective de leur groupe social. Autrefois, tout se faisait collectivement : l'essartage, la culture du riz, la construction des maisons, la capture des éléphants sauvages, etc. Toutes ces populations vivaient en autarcie dans la forêt qui pourvoyait à leurs besoins : nourriture, soins et matériaux pour la construction des maisons, des greniers à riz et du mobilier. Bien entendu, ces sociétés pratiquaient des échanges commerciaux interethniques ; les hommes les plus vaillants partaient même en Chine pour échanger les produits de la forêt (plantes, ivoire, pierres précieuses…) contre des produits inconnus chez eux. Ainsi, cette vision collective de la vie quotidienne se prolonge-t-elle dans le jeu des gongs. Chaque musicien produit une note de la mélodie dont la base est généralement un chant. D’ailleurs, avec le système de jeu en hoquet, pour savoir à quel moment le musicien doit jouer la note, il chante la mélodie dans sa tête, repère la note et frappe son gong.

 

Rôle et jeu

Les ensembles de gongs sont joués lors des rites liés aux esprits (yang), aux défunts ou encore (et de plus en plus) lors de simples réjouissances avec les touristes locaux, internationaux et des VIP. Autrefois (mais aujourd’hui encore selon le niveau de développement) diverses fonctions étaient dévolues aux ensembles de gongs selon le moment où ils étaient joués :

  • outils de communication permettant d’éveiller, d’inviter et de satisfaire les esprits bienveillants (offrande sonore) ;
  • exorcisation des esprits considérés comme maléfiques ;
  • outils de convivialité animant les danses rituelles (elles-mêmes offrandes aux esprits) et rapprochant les hommes.

L’inauguration d’une maison, les funérailles, la cérémonie d’abandon du tombeau (rite accompagnant le départ de l’âme du défunt vers le pays des morts), l’accueil d’un étranger, les retrouvailles familiales, etc. étaient autant d’occasion de frapper les gongs. Aujourd’hui, compte tenu de l’altération des croyances anciennes, la limite entre la notion de communication avec l’au-delà et celle de pures réjouissances est difficile à évaluer. Ces cérémonies sont généralement accompagnées de grandes libations de bière de riz, boisson légèrement alcoolisée que l’on boit dans des jarres avec des chalumeaux en bambou.

Selon les ethnies, les gongs sont joués soit à l’intérieur de la maison, soit à l’extérieur, soit encore les deux. Pour une ethnie et un ensemble de gongs donnés, la place de chaque gong et de chaque instrumentiste est précisément définie et non interchangeable. C’est toujours le musicien qui se déplace et non le gong.

Chaque ethnie possède sa propre organisation spatiale des gongs et sa propre manière de jouer. Certains ensembles ne possèdent que des gongs plats, d’autres seulement des gongs à mamelon, d’autres encore un panachage des deux. Le nombre de gongs par ensemble varie de deux à plus de vingt.

Le jeu des gongs utilise la technique dite du hoquet puisque, dans un ensemble, chaque protagoniste ne possède qu'un gong et que l'objectif est de jouer une mélodie composée d'un maximum de cinq notes. Dans l'ensemble des ethnies de la grande région frontalière du Laos, du Cambodge et du Viêt Nam, le hoquet est une pratique courante pour les gongs, la flûte de Pan éclatée ou l'orgue de bambou à onde de choc.

 

Qui joue les gongs ?

Toutes les ethnies minoritaires vivant au sud du Laos jouent les gongs. Chez certaines, seuls les hommes jouent, chez d'autres les rôles peuvent être mixtes. Nous présentons les ensembles de trois d'entre elles : Lawae (ou Brao), Oy et Talieng.

Nous vous invitons à consulter les PAE connexes mentionnés dans le sommaire, ainsi vous pourrez vous faire une idée assez substantielle de ce que représentent les ensembles de gongs dans cette région du monde.

 

Fabrication

Les gongs sont fabriqués par coulage du bronze (de plus en plus rare) ou par martèlement (la norme aujourd'hui au Viêt Nam). Cet artisan de la région de Hội An connaît les deux techniques et possède même un moule pour la fabrication des gongs à mamelon. Chaque surface, plane ou concave, doit être martelée afin d'offrir de la rigidité au métal, à l'image d'une bouteille d'eau en plastique aux fines parois. Sans les motifs qui la compose, elle n'aurait pas assez de rigidité.

 

Lieu et date : Viêt Nam, région de Hoi An. 20 mars 2002.

Durée : 02:55. © Patrick Kersalé 2002-2024.


 

Dimensions

La taille des gongs étaient autrefois inféodée aux dimensions corporelles, à l'instar des flûtes, des maisons, des greniers à riz ou encore du mobilier. Les hommes de la génération la plus ancienne connaissent parfaitement ce sujet. Les proportions relèvent soit de dimensions fixes, propres et proportionnelles à chaque individu (coudée, empan, main, etc.), soit d'une combinaison de ces valeurs de base. L’objectif final est double :

  1. Que les gongs offrent les notes de l’échelle musicale utilisée par le chant (dans le cas où les gongs reproduisent la mélodie des chants).
  2. Que les gongs, selon leur nature, s’encastrent les uns dans les autres. Cette raison purement pratique permet le stockage et le transport dans les meilleures conditions de ces précieux biens. Une fois encastrés, les gongs sont rangés dans des paniers en bambou tressé. N’oublions pas que tous les peuples des hauts plateaux étaient autrefois des semi-nomades et que les précieux gongs devaient suivre les déplacements dans les meilleures conditions de sécurité. Un seul gong égaré et toute cérémonie était compromise.

Lieu et date : Viêt Nam, région de Hoi An. 20 mars 2002.

Durée : 01:55. © Patrick Kersalé 2002-2024.



Ethnie Lawae

Les Lawae, aussi appelés Brau ou Brao, se répartissent dans les proches confins frontaliers du Laos, du Cambodge et du Viêt Nam. Ils sont un unique peuple, aujourd’hui divisé par des frontières administratives alors qu’il y a quelques décennies encore, lorsque la forêt offrait une continuité, ils allaient et venaient entre ces trois territoires.

GeoZik a effectué deux missions chez les Lawae du Laos, en mars 1999 et en janvier 2006. En 2012, nous sommes allés à la rencontre des Brao du Cambodge, mais sans pouvoir effectuer aucun enregistrement. Quant à ceux du Viêt Nam, il était impossible, à l'époque où nous étions en mission dans leur région, fin des années 1990, début des années 2000, de s’y rendre pour des motifs politiques. Mêmes les Viêt ne pouvaient s'approcher de la frontière.

Tous les Lawae/Brao jouent les gongs selon deux ensembles distincts : khong chum et khong tha (ces appellations sont valables pour les Lawae de la province d’Attapeu au sud du Laos). Le premier ensemble est également joué par d’autres ethnies auxquelles il a probablement été emprunté. Nous allons nous intéresser ici au second ensemble, joué uniquement par les Lawae et Brau. Ce couple de gongs porte divers noms selon sa localisation et ceux qui le nomment : khong la (nom donné par les Lao Loum, l'ethnie majoritaire au pouvoir, soit litt. “gongs lawae”), khong tha, ou simplement tha, bengbong (nom donné par les Lawae du Laos), chieng tha, tha (Viêt Nam).

 

khong tha

Historicité

Le bronze parvient en Asie du Sud-Est autour du IIIe s. AEC (sud de la Chine et Culture de Đông Sơn au nord du Viêt Nam à laquelle on doit notamment les tambours de bronze). Concernant les gongs de bronze que nous les connaissons sur les haut-plateaux de la chaîne annamitique, nous ignorons exactement quand ils sont arrivés. Sur les bas-reliefs des temples angkoriens (XIe-XIIIe s.), le plus grand et le plus ancien livre de pierre de la région, aucun gong de ce type n’est représenté (malgré ce qu’affirme la littérature scientifique ou de vulgarisation). À titre d’hypothèse, et eu égard à la recherche de clarté sonore de ces gongs particuliers, il est probable que l’ancêtre du khong tha ait été constitué de deux pierres sonores (lithophone). Un exemple de deux pierres trouvées au Cambodge (sans qu’un lien direct puisse être établi) a été trouvé au Cambodge. Pour en savoir plus, cliquez ici.

 

Facture

Le khong tha est constitué d’un couple de deux gongs plats de dimension plus ou moins semblables de 52 à 68 cm de diamètre, avec un rebord à angle droit de 3,5-4,5 cm. Ils étaient autrefois coulés puis forgés selon un processus assez technique ; aujourd’hui, des gongs de piètre qualité sont achetés aux forgerons vietnamiens de Kontum ou de Pleiku. À la fin des années 1930, des forgerons officiaient dans le district laotien de Phuvong dans province d'Attapeu. La qualité des instruments était meilleure parce que l’alliage mieux dosé, alors que de nos jours, les forgerons utilisent du métal de récupération sans souci du résultat final. Les proportions de cuivre et d’étain et/ou plomb — voire autres métaux — était tellement secrètes que les vieux forgerons les ont emportées dans leur tombe. Aujourd'hui, les artisans vont au plus simple : ils fondent des matériaux de récupération, conduisant à une qualité sonore approximative. Selon les musiciens locaux, bien que le son des deux éléments du khong tha ait l'air merveilleux et brillant pour des oreilles néophytes, eux le jugent moins attrayant qu'auparavant. D’avis de spécialiste, pour obtenir un gong de qualité, il convient de forger une plaque de bronze plus épaisse vers le centre, avec une petite protubérance de 5 mm ! Une nuance inconnue des forgerons vietnamiens.

 

Occasions de jeu

Le khong tha n’est un objet de simple divertissement, même s'il y participe. L’instrument est sacré et protégé par une entité spirituelle (Tha), à l’instar de tout ce qui entoure les Lawae (et autres minorités de la région) à savoir, la maison, son escalier et son mobilier, les greniers à riz, le riz lui-même, etc.

Avant de suspendre le khong tha, il convient d’offrir un sacrifice : a minima un poulet et une jarre de bière de riz. Un officiant (chaman) verse le sang du poulet à l’intérieur des gongs puis les frottent de sa main plusieurs fois dans un mouvement circulaire dextrogyre ; il verse aussi de la bière de riz et invite ensuite les entités spirituelles à boire en les priant aux quatre orients. 

Les gongs sont suspendus soit à une poutre de la maison, soit dans un cadre à l’extérieur. Le khong tha est joué chaque fois que la vie de la famille ou de la collectivité est engagée dans un changement important, pour célébrer le début ou la fin d’un cycle afin de s’allier les entités spirituelles. En résumé, le khong tha est frappé pour honorer les invités, pendre une crémaillère, avant un essartage, avant d’acheter ou vendre du bétail ou pour honorer un invité (cas de notre vidéo).

 

Jeu

Contrairement à la plupart des autres ensembles de gongs de la région, le tha est l’occasion de compétitions au cours desquelles plusieurs hommes ou femmes vont frapper les gongs deux à deux. Une fois les gongs suspendus et l’emplacement des musiciens aménagé, l'ordre de passage des protagonistes est négocié.

Pour jouer, les deux joueurs s'asseyent face à face, séparés par les deux gongs. Chacun utilise soit des heurtoirs de nature différente selon qu’il est placé à l’intérieur ou à l’extérieur des gongs (Vidéo 1), soit de longues baguettes (Vidéo 2). Dans le cas de notre vidéo, l’homme situé à l’extérieur (nous le nommerons désormais le “défieur”), utilise deux bâtons de bois d’une quarantaine de centimètres de long et pour celui  à l’intérieur (le “défié”), deux longues baguettes d'environ 115 cm, dont l’extrémité en contact avec le gong est enrobée de bandelettes de cotonnade. Ces longues baguettes sont faites d'un bambou avec de courtes sections internodales d'un diamètre maximal de 2 cm ; il peut aussi être fait d'un bois léger telle une branche de jacquier.

Les deux baguettes sont rigoureusement de même taille et de même poids afin que le musicien ait la même sensation dans chaque main. Elles sont emprisonnées, le temps du jeu, dans une boucle passant par l’axe de suspension des gongs. Les deux joueurs frappent le centre du gong. Les pieds du défié stabilisent les gongs afin qu’il ne se balancent pas lorsque les frappes deviennent plus véhémentes.

 

Défis

Tout joueur prenant part au jeu du khong tha cherche à démontrer sa virtuosité et sa capacité à prendre des risques, à l’image de ce qu’il pourrait faire dans la vie quotidienne, au service de la communauté villageoise. Sa capacité à s’investir et à se mettre en danger face à la communauté villageoise est une manière de démontrer sa bravoure. Précisons ici que les minorités ethniques vivant sur les haut-plateaux de la chaîne annamitique (autrefois appelés Montagnards par les colons français) ont une vision collective de leur société, à l’opposé de l’Occident moderne et urbain. Qu’il soit adulé ou contesté, tout joueur met ou remet en jeu sa réputation, à l’image d’un champion du monde remettant son titre en jeu. Lors une session de jeu du khong tha, les deux protagonistes ont des rôles différentiés : à l’extérieur le “défieur”, à l’intérieur, le “défié”. Hommes ou femmes peuvent participer indifféremment de chaque côté. Pour initier le jeu, le défieur commence par quelques coups d'essai puis installe un ostinato* en frappant de manière alternative avec les heurtoirs gauche et droit. Il devra jouer sans défaillir durant toute la durée de la performance. Même si cela peut paraître banal, tenir sans faillir un simple ostinato durant tout le temps de la performance (généralement une quinzaine de minutes) est déjà un défi en soi. Des tensions et douleurs musculaires peuvent apparaître à tout moment et il ne faudra rien laisser percevoir. Le joueur placé du côté intérieur commence par des battements parallèles à ceux du défieur puis, peu de temps après, il imbrique des motifs de son choix. Se compose alors une “pâte mélodico-rythmique” que le défié module en intensité par diverses accentuations et par des changement de la structure rythmique. Tous ces ingrédients composent une polyrythmie sur deux notes ! Le défieur stimule son adversaire en augmentant le volume et l'intensité sans toutefois renoncer à la régularité du tempo. Pour les parties particulièrement créatives et réussies, le défié est parfois félicité par des acclamations du public. Une fois le point culminant atteint, généralement marqué par un passage remarquable, le joueur défié conclut la séance et couche les heurtoirs à plat sur le sol. Le défieur met fin à la performance par quelques coups parallèles stridents particuliers. Deux autres joueurs sont alors invités à continuer.

 

Concentration et enjeux sociaux

Au cours du jeu, comme c’est d’ailleurs le cas pour tous les autres ensembles de gongs malgré leurs différences, les joueurs sont extrêmement concentrés. Ils ne regardent ni autour d'eux ni le joueur lui faisant face. L’expression du visage traduit le challenge individuel et sociétal auquel chacun est confronté, notamment le défié. Il existe une série de raisons liées à la concentration dont font preuve tous les joueurs de gongs de la grande région des hauts-plateaux. Gageons sur quelques pistes :

  • Autrefois, ces hommes vivaient dans la forêt primaire, de chasse et de cueillette ; ils étaient confrontés à de multiples dangers : tigres et autres fauves, éléphants sauvages, serpents, insectes, plantes épineuses…
  • D’incessantes guerres interethniques émaillaient leur existence, nécessitant une vigilance de tous les instants.
  • La technique de jeu particulière à ce couple de gongs lie les deux protagonistes. Même s’ils s’affrontent, ils se respectent. Le défieur supporte, par la perfection de son ostinato, les prouesses techniques de son partenaire. De même, durant la chasse ou la guerre, chacun devait pouvoir compter sur autrui. Il existe une autre activité artistique dans laquelle les protagonistes font preuve d’une intense concentration : les joutes parlées-chantées auxquelles les peuples de cette région s’adonnaient autrefois, plus rarement aujourd’hui. GeoZik a eu l’occasion, en 2002, de filmer l’une d’elles chez les Êđê de la province du Đắk Lắk. Pour y accéder, cliquez ici.
  • Les deux protagonistes s’exposent face à un public villageois qui connaît leurs atouts et faiblesses. Il y a quelque chose d’initiatique dans cet exercice. Il ne s’agit pas, avec le khong tha, de jouer une mélodie connue, mais d’innover, d'émouvoir l’assistance, ce qui se soldera dans l’instant par une récompense sonore et, à moyen et long terme, par une reconnaissance de la compétence intrinsèque des protagonistes. Le jeu du khong tha est le reflet de l’âme, du courage, de l’investissement et de la capacité des protagonistes à se mettre en danger. Il est probablement plus courageux de s’exposer face des gens avec lesquels on doit vivre sa vie durant dans la promiscuité que de jouer devant un parterre d’inconnus dont on n’entendra plus jamais parler après le concert. À méditer…

Si l’on peut lire une telle concentration sur les visages, on peut aussi détecter — de l’expérience de GeoZik — une immense souffrance à la fois individuelle et collective. Rendons ici hommage aux Lawae et autres peuples des hauts-plateaux, pour leur résilience face aux calomnies et humiliations subies depuis des décennies, tous territoires nationaux confondus : non-respect de leur humanité car affublés du qualificatif de “sauvages”, dégradation et confiscation de leurs territoires ancestraux par les trois états nations qui les gouvernent alors qu’ils sont tous des primo-habitants au même titre que les Indiens d’Amérique ou les Aborigènes d’Australie, déplacement depuis les campements forestiers traditionnels ombragés par la forêt pour des villages de regroupement en plein soleil (de surcroît sous des tôles !) au prétexte que des mines et des bombes non explosées tapissent la forêt (ou ce qu’il en reste), etc. Le pouvoir peut ainsi mieux les contrôler et couper à l’envi la forêt pour nourrir le très lucratif commerce du bois.

Les documents provenant de ces régions et présentés par GeoZik sur ce site sont les derniers témoignages de la vie de ces peuples. Si certaines vidéos sur YouTube montrent des minorités en costumes jouant les gongs et se trémoussant, il ne s’agit que de parodies organisées par les trois pays frontaliers (Viêt Nam en tête !) au service d’une propagande d’état ; les minorités doivent obéir au dictat culturel orchestré par l’ethnie dirigeante.

 

Échelle de deux sons

Tout le challenge du khong tha se joue donc sur une échelle de deux notes et malgré tout, les joueurs sont capables de faire vibrer un auditoire malgré un tel minimalisme. Notons toutefois, selon la qualité des gongs, qu’un “halo harmonique” enrichit la “pâte mélodico-rythmique”. Cette échelle de deux notes est à l’image de la structure des incantations pour les entités spirituelles ou bien de la récitation parlée-chantée des légendes anciennes composée sur deux uniques notes, une pratique aujourd'hui en déshérence.

 

Vidéo 1

Selon le propriétaire du khong tha, M. Bun Nion, également chef du village et l'un des deux joueurs, son instrument daterait du XIVe siècle. Il contiendrait d'autres métaux en dehors du bronze, normalement composé de cuivre et d'étain et/ou plomb, à savoir de l'argent, de l'or et du fer… De nombreuses croyances, liées à l'âge et à la préciosité des objets, se transmettent de génération en génération. Si l'argent et l'or sont deux métaux récurrents dans la composition des objets sonores en bronze, le fer n'a que peu de chance de se trouver dans l'alliage compte tenu du niveau de son point de fusion. À titre de comparaison, voici la liste des métaux sensés composer le khong tha et leur point de fusion respectifs. Sauf à avoir réalisé le gong chez un forgeron capable de fondre le fer, un fondeur de bronze est incapable d'une telle prouesse. Nous n'excluons toutefois pas une telle possibilité si les gongs sont vraiment anciens car les forgerons d'autrefois savaient réduire le minerai de fer.

 

Point de fusion des métaux sensés composer le tha de notre vidéo : cuivre : 1 085 °C., étain : 231,9 °C., plomb : 327,5 °C., argent : 961,8 °C., or : 1 064 °C., fer : 1 538 °C.

Les forgerons proprement dits étaient ceux qui autrefois savaient faire un feu avec un point de fusion supérieur à 1538 °C. pour réduire le minerai de fer. Avec l'arrivée massive de matériaux industriels et leur recyclage, il n'est plus nécessaire de réduire le minerai de manière artisanale. Par ailleurs, cette opération était entourée de magie, de prières et de chants que tout le monde a désormais oublié. Les fabricants contemporains de gongs savent obtenir le point de fusion du cuivre, un tiers plus bas que celui du fer, mais rien de plus…


La vidéo 1 a été tournée à deux caméras hors contexte festif. On remarquera :

  • La manière dont les gongs sont suspendus et les baguettes horizontales maintenues à l’aplomb du point de suspension.
  • La surface ondulée des gongs due au martèlement du forgeron, une méthode devenue unique au Viêt Nam, pays d’où ils proviennent.
  • Comment le joueur situé à l’intérieur (le défié) maintient les gongs avec ses pieds.
  • Que le joueur situé à l’extérieur (le défieur) frappe avec une paire de bâtons.
  • Que le joueur situé côté intérieur frappe avec une paire de longues baguettes en bambou avec de courtes sections internodales tenues horizontalement, dont l’extrémité est enrobée de bandelettes de cotonnade.
  • La concentration des joueurs et la direction de leur regard.
  • Les changements rythmiques et les accents dynamiques.
  • En faisant jouer la séquence au début puis en allant brusquement vers la fin, on constate que le tempo s’est accéléré.

Musiciens : Bun Nion, Sum Pet.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Mac Kiang. 3 janvier 2006.

Durée : 04:52. © Patrick Kersalé 2006-2024. 


 

Vidéo 2

Contrairement à la vidéo précédente, les deux musiciens utilisent de longues baguettes. Ils sont aidés par un troisième homme qui stabilise les gongs, offrant ainsi aux musiciens de se concentrer sur la seule production sonore.


Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Van Nhang. 3 mars 1999.

Durée : 01:24. © Patrick Kersalé 1999-2024. 


 

La séquence pas-à-pas

Cette séquence a été tournée avec deux caméras, ce qui a permis d'obtenir plusieurs points de vue.

00:00 - Les gongs sont suspendus. La hauteur par rapport au sol est mesurée avec le pied relevé. On remarquera l'excroissance au centre de chaque gong, de même que leur texture lisse, attestant d'une certaine ancienneté. Par conséquent il est probable que ces deux gongs aient été moulés et non martelés. On remarquera également l'épaisseur de la paroi, ce qui est impossible à obtenir par un martèlement artisanal.

00:20 - Cette corne de buffle, avec son trou antérieur, représente la quantité de bière de riz devant être bue par le convive tenant le chalumeau. Il ne pourra pas le passer à autrui avant de s'être acquitté de son obligation.

00:25 - Un troisième homme a la charge de stabiliser les gongs, permettant ainsi aux musiciens de se concentrer sur leur tâche.

00:25 - Cette grand-mère fumant un cigare local. Ses oreilles porte des labrets en plastique, autrefois en ivoire d'éléphant.

00:50 - Remarquez le tatouage traditionnel sur le menton.

01:14 - Convives autour de la jarre de bière de riz dans la maison du chef de village.

 

khong chum

L'ensemble khong chum compte cinq gongs. Il est joué lors de fêtes à caractère joyeux (mariage, inauguration d’une maison…), lors de cérémonies nécessitant un sacrifice de buffle(s) et les funérailles. Seuls les répertoires diffèrent. La musique est à la fois objet de divertissement et d'offrandes aux entités spirituelles. Cet ensemble a été filmé en situation, en fin de journée, à la veille d'un mariage.

 

Vidéo 1

La séquence pas-à-pas

Cette séquence a été tournée avec deux caméras, ce qui a permis d'avoir plusieurs points de vue.

00:00 - Les cinq gongs sont attachés par ordre de taille à une poutre de bambou, elle-même fixée aux piliers de la maison sur pilotis. Ainsi, du plus grand au plus petit : 1. 'mɛ, 2. bƏ, 3. (kuᴐn) mong, 4. (kuᴐn) chang vang, 5. (kuᴐn) tƏhᴐ. Le premier représente la mère, le second le père puis les trois enfants kuᴐn. Il en est presque toujours ainsi pour l'appellation des gongs. Le premier représente toujours la mère puisque la presque totalité des ethnies de la région sont matrilinéaires (et non matriarcales). On remarquera que le mamelon laisse apparaître la couleur du bronze, témoin d'une utilisation fréquente. 

00:20 - Les convives boivent la bière de riz dans des jarres avec un chalumeau de bambou. La possession de jarres, à l'instar des gongs, représente un signe extérieur de richesse. Hommes et femmes se mélangent sans ségrégation.

00:23 - Les gongs 2 à 4 sont frappés avec une mailloche et la mère, directement avec le poing. Les joueurs étouffent la résonance après chaque frappe.

00:28 - La femme au corsage blanc, au milieu des convives au premier plan, attend que le niveau de la bière baisse pour ajouter de l'eau.

01:13 - La femme à gauche emplit d'eau une corne de buffle, mesure correspondant à ce que doit normalement boire un convive avant de céder son chalumeau à un d'autre. Les libations de bière de riz sont très codifiées. Il est important de s'enivrer pour honorer son hôte !

01:35 - Certains chalumeaux sont faits avec un tuyau en plastique (cathéter) ou une combinaison bambou/tuyau.

01:58 - Dans ces régions, de nombreuses femmes fument la pipe.

02:06 - Remplissage d'une jarre. On voit le riz en affleurement.

02:31 - Remarquez le jeu de la main gauche venant étouffer la résonance du gong.

02:51 - Le joueur du gong 5 fait une frappe répétée pour demander à quelqu'un de le remplacer, mais sans succès.

03:33 - À partir de ce moment, nous avons ajouté, à la prise de son stéréophonique globale, le son de chaque gong montré à l'image et enregistré avec les micros de la seconde caméra.

03:50 - Le mamelon du gong 4 est cassé, ce qui ruine littéralement la qualité du son initial. Toutefois, cela n'empêche personne de faire la fête !

04:08 - Le joueur du gong 5 déclare forfait !

04:27 - La femme ne lâche pas le tuyau tant que quelqu'un d'autre ne s'en est pas saisi. Cette règle vaut pour toutes les ethnies.

 

Musiciens : Bun Ma, Kam Pan, Tha Ôm, Chua Pô, Chua Se, Chua Lam.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, dist. Sanxay, vill. Ban Pia Keo. 2 janvier 2006. Durée : 04:38. © Patrick Kersalé 2006-2024. 


 

Vidéo 2

Musiciens : Sum Pet, Bun Nion, Bun Ngong, Nyeut, Khan Chanh.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Mac Kiang. 3 janvier 2006.

Durée : 02:01. © Patrick Kersalé 2006-2024. 


 

La séquence pas-à-pas

Cette séquence a été tournée à caméras afin d'offrir divers points de vue.

00:00 - L'ensemble se compose de cinq gongs à mamelon. Le troisième, au milieu, posé à plat, marque le tempo.

00:18 - Le quatrième gong est frappé avec la tranche d'une tong.

00:22 - Le deuxième gong est frappé avec un bâton enveloppé d'une étoffe.

00:25 - Le plus grand gong (la mère) est frappé avec le poing.

00:58 - On peut lire la concentration sur ce visage. Le regard est fixe et lointain.

01:09 - Le cinquième gong est frappé avec un bâton non enveloppé.

 

pe plei

L'ensemble khong pe plei compte trois gongs [1. yu (mère), 2. bo (père), bel (dernier)] et deux bambous pilonnants. Il a été enregistré hors contexte. Il est normalement joué au moins de juin, après la récolte du riz, à l'intérieur de la maison.

khong pe plei. © Patrick Kersalé 2006-2024.
khong pe plei. © Patrick Kersalé 2006-2024.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Kan. 3 janvier 2006.

Durée : 02:50. © Patrick Kersalé 2006-2024. 


 

La séquence pas-à-pas

Cette séquence a été tournée avec deux caméras, ce qui a permis d'avoir plusieurs points de vue. Le contexte a été dicté par notre tournage.

00:00 - Les trois gongs sont attachés par ordre de taille à un bambou transversal. Le plus grand est frappé avec le poing, les deux autres avec un morceau de bois tendre. Les deux bambous, ouverts aux deux extrémités, appartiennent à une espèce comportant de longs entrenœuds. Ils sont alternativement percutés entre eux et sur un tabouret de bois. La mélodie comporte seulement quatre temps répétés à l'envi.

00:26 - Femme fumant une pipe de bambou. On remarquera ses oreilles percées qui portaient autrefois un labret fait d'une tranche de défense d'éléphant.


Ethnie Nghe

Les Nghe vivent dans des villages construits autour d’une maison commune (röng) que l’on pourrait également qualifier de “maison des esprits”. Dans ce sanctuaire sont en quelque sorte domestiqués, à l’intérieur du village, les yang de l’extérieur que l’on cherche à se concilier. Ce tournage a été réalisé lors d’une grande cérémonie annuelle (fête du travail tak sapay) célébrée en l’honneur de l’esprit des parents sur la place du village et à l’intérieur de la maison commune. Ce jour-là, quatre animaux domestiques (deux buffles, un bufflon et un veau) ont été sacrifiés.

L’ensemble est constitué de deux gongs (prno, talê). Les musiciens marchent en tête des danseurs “martiaux”. Tous effectuent une circumambulation sénestrogyre autour de la maison commune dans laquelle un tambourinaire frappe un grand tambour en tonneau sökör posé à même le plancher. Les deux joueurs de gongs effectuent les mêmes pas que les danseurs qui décrivent une complexe chorégraphie changeant à chaque tour.


Après avoir tourné trois fois autour de la maison commune, danseurs et joueurs de gongs y pénètrent et dansent en criant autour du sanctuaire érigé au centre de l’édifice. Après le sacrifice des animaux, quelques morceaux de viande sont offerts aux esprits et les animaux sont consommés par les villageois.

Les danseurs sont armés de boucliers (concaves), de sabres et de baudriers semblables (dans l'esprit) à ceux représentés sur les bas-reliefs des temples angkoriens du Cambodge (Angkor Vat, Bayon, Banteay Chhmar notamment). Il s'agit d'une survivance de cette lointaine époque. Les danses martiales existaient à l'époque angkoriennes et perdurent aujourd'hui encore de certaines régions du monde.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Kien Khon. 7 mars 1999.

Durée : 03:18. © Patrick Kersalé 1999-2024. 



Ethnie Oy

Les Oy du sud du Laos jouent un ensemble de trois gongs appelé khong juᴐ en langue oy et khong chum en langue lao (langue nationale du Laos). Chacun porte un nom, soit dans l'ordre hiérarchique : 1. khong juᴐ (gong mère), 2. khong tu (gong du milieu), 3. khong khuan (gong enfant).

Sur cet ensemble de trois gongs, un élément est remarquable : plus le gong est aigu, plus il produit de notes. Ce fait pourtant banal dénote une tendance qui se retrouve dans le gamelan Balinais ou dans les orchestres de percussions mélodiques tels que le pin peat des Khmers du Cambodge. En fait, cet élément est très important car il démontre ici la place de la femme dans les sociétés matrilinéaires de la région. Avant que ces minorités ethniques ne soient administrées par un gouvernement central (Laos, Cambodge, Viêt Nam), elles vivaient dans la forêt sans chefferie.


Le chef de village et le chef de famille étaient les niveaux hiérarchiques les plus élevés. Ces sociétés se sont pas matriarcales mais matrilinéaires, c'est-à-dire que la filiation, le nom et les biens passent par la mère. On comprend alors son importance. Ainsi, plus le rang est élevé plus la parole est rare et respectée. À l'opposé, les enfants, dans leur innocence, ont la parole facile. La notion du grave et de l'aigu est elle aussi importante. Les gongs sont toujours spatialement hiérarchisés dans l'aire de jeu et il ne viendrait à l'idée de quiconque de les inverser. Dans le même esprit, il ne viendrait à l'idée de personne de se positionner socialement ou hiérarchiquement sans avoir été coopté, à moins de souhaiter répandre le chaos. En résumé, plus le gong est grave, moins il produit de notes et plus le gong est aigu, plus il produit de notes. Ainsi, la hiérarchie des gongs reflète celle de la société.

 

Musiciens : Bong, Bun Hom, Bun Theyan.

Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Saphone. 4 mars 1999.

Durée : 00:47. © Patrick Kersalé 1999-2024. 


 

La séquence pas-à-pas

Cette séquence a été tournée à deux caméras, ce qui a permis d'obtenir plusieurs points de vue. Le contexte a été dicté par notre tournage.

00:00 - Les trois gongs sont classés de gauche à droite (du point de vue du spectateur) par ordre d'importance. Le plus à gauche, la mère, est frappé avec le poing, les deux autres avec une mailloche.

00:03 - Le gong 3, le plus aigu, donne le tempo. Compte tenu de sa surface lisse, ce gong est relativement ancien. Il a probablement été coulé et non martelé.

00:06 - Le gong 2. Au son, on peut détecté qu'il est fêlé, raison pour laquelle il semble plus aigu que le gong 3.

00:10 - Riz glutineux (appelé aussi riz gluant), très prisé au Laos, dans un contenant en bambou tressé. 

00:16 - Le gong 1, mère, frappé avec le poing.


Ethnie Salang

Les Salang font partie des groupes ethniques de langue austro-asiatique. Ils vivent principalement dans les provinces de Saravan et de Sekong, dans le sud du Laos. Le village de Ban Dak Tuk où nous avons effectué notre tournage comportait à l'époque 43 maisons dans lesquelles vivaient 239 personnes.

L'ensemble comporte neuf gongs dont trois à mamelon (hom yao - mère, nay - milieu, con - fils), quatre plats (chieng) et un tambour en tonneau (a gal). Le plus grand gong à mamelon est suspendu et frappé avec le poing, les deux autres avec la tranche d'une tong. Les gongs plats sont percutés à l'intérieur.

Au début de la séquence règne un certain cafouillage car les musiciens n'ont pour autre occasion de jouer que les cérémonies. Au début d'une pièce, il faut parfois un temps d'adaptation pour savoir à quel moment frapper le gong. Les musiciens chantent la mélodie dans leur tête pour savoir à quel moment ils doivent jouer leur note.

 

Lieu et date : Laos, vill. Ban Dak Tuk. 4 janvier 2006.

Durée : 06:01. © Patrick Kersalé 2006-2024. 



Ethnie Talieng

L'ensemble de gongs plats chiang des Talieng est singulier. Les musiciens jouent une “improbable” mélodie en laissant longuement résonner le métal. Les instruments sont épais à l'instar du khong tha des Lawae. Au son bref et sec du bambou percuté s'oppose celui des gongs à la longue résonance. Chaque instrument porte un nom : gong 1. phii, gong 2. kon (enfant), bambou tœk (probablement un terme onomatopéique). Phii est frappé à l'intérieur et kon à l'extérieur. On remarquera le mouvement singulier de la main du joueur de kon au moment de la frappe. Les traces claires marquant l'emplacement du pouce et de l'index démontrent la récurrence de la technique à l'origine de la production des nombreux harmoniques.


Lieu et date : Laos, prov. Attapeu, vill. Ban Phia May. 5 mars 1999.

Durée : 00:59. © Patrick Kersalé 1999-2024.